2.1

Des données plus riches,
des modèles plus performants

Collecter et exploiter des données tous terrains

Utiliser les données des radiomètres micro-ondes dans le modèle AROME : cas d’étude en vallée alpine

Série temporelle de profils de température observés par radiosondage (a), issus des prévisions 1 heure du modèle AROME (b), obtenus après assimilation 1D des observations de radiomètre micro-onde (c), lors de la campagne Passy-2015 du 6 au 20/02/2017. © Météo-France.
Série temporelle de profils de température observés par radiosondage (a), issus des prévisions 1 heure du modèle AROME (b), obtenus après assimilation 1D des observations de radiomètre micro-onde (c), lors de la campagne Passy-2015 du 6 au 20/02/2017. © Météo-France.

La vallée de Passy, en Haute-Savoie, est régulièrement concernée par des pics de pollution intense. Ces derniers surviennent à la faveur de conditions hivernales anticycloniques, au cours desquelles l’incertitude relative aux prévisions météorologiques est souvent marquée.

Pour améliorer la compréhension et la prévision de ces événements, Météo-France a lancé en 2015 la campagne de mesures Passy-2015, au cours de laquelle un radiomètre micro-onde au sol a été déployé. Cet instrument fournit des mesures en continu des profils de température et d’humidité ainsi que du contenu intégré en eau liquide de l’atmosphère. Sa résolution temporelle inégalée (de l’ordre de quelques minutes) permet de suivre l’évolution du cycle de vie de la couche limite, c’est-à-dire de la partie basse de l’atmosphère située juste au-dessus de la surface terrestre, pour assimiler ces données dans le modèle de prévision numérique du temps AROME. L’état initial de l’atmosphère pris en compte par le modèle est alors plus proche de la réalité, ce qui améliore in fine ses prévisions.

Les travaux réalisés lors de la campagne Passy-2015 ont mis en évidence les limites du modèle AROME, qui sous-estime largement le refroidissement qui se produit à proximité de la surface, les erreurs de prévision pouvant atteindre 12 °C lors du pic de pollution. En combinant les observations du radiomètre micro-onde aux prévisions à 1 heure du modèle, l’erreur observée dans l’état initial du modèle a pu être fortement réduite, à la fois en surface (passant de 8 °C à 0,5 °C) et à la base de stratus. Au-delà de l’état initial, c’est aussi l’évolution temporelle de cette couche limite qui est nettement mieux représentée dans le modèle grâce à la prise en compte de ces observations haute-fréquence.

Ces travaux ouvrent la voie à des études d’assimilation opérationnelle de ces données dans le modèle AROME. Elles devraient permettre d’améliorer la prévision de plusieurs événements à fort enjeu économique et social : pollution mais aussi brouillard et évènements précipitants intenses.

Réseau PIRATA : 20 ans de données sur l'Atlantique tropical

L'ancienne bouée PIRATA est saisie sur le pont du Thalassa. © IRD, Bernard Bourlès.
L'ancienne bouée PIRATA est saisie sur le pont du Thalassa. © IRD, Bernard Bourlès.

L’océan Atlantique tropical joue un rôle déterminant dans la prévision météorologique, la prévision saisonnière ou l'étude du climat des Amériques, de l'Afrique et de l'Europe. Depuis 20 ans, des océanographes et météorologues français, brésiliens et américains ont développé et exploité un réseau de 18 bouées ancrées pour étudier et surveiller ce bassin. Baptisé PIRATA (Prediction and Research Moored Array in the Tropical Atlantic), ce dispositif, auquel s'ajoutent les campagnes à la mer qui permettent d'en assurer la maintenance, fournit des données de grande qualité sur la température de l'air et des profondeurs, la pression atmosphérique, la salinité ou bien encore la pression partielle de dioxyde de carbone. Ces dernières alimentent en temps réel les modèles de prévision de l'atmosphère et de l'océan et sont utilisées par les chercheurs pour étudier les caprices de l'océan et les évolutions du climat.

Fruit d’une coopération internationale, PIRATA répond donc à la fois à des objectifs scientifiques et opérationnels, fédérant des organismes de recherche – l'IRD (Institut de recherche pour le développement) en France, l'INPE (institut brésilien de recherche spatiale )... – et les services météorologiques – la NOAA (National Oceanographic and Atmospheric Administration) et Météo-France. Observer sur le long terme la variabilité de l'Atlantique tropical est essentiel. Cette zone est clé pour de nombreux besoins de recherche mais aussi pour des applications très pratiques de prévision du temps et des événements extrêmes : mousson africaine, sécheresses du Nordeste brésilien, cyclones. Les bouées PIRATA ont ainsi enregistré et transmis des informations précieuses sur l’ouragan Irma, qui ont permis aux services américains et français d’affiner leurs prévisions et d’émettre des alertes adaptées pour la sauvegarde des populations antillaises.

Mieux prévoir et avertir en outre-mer

Nouveau modèle de vagues côtières pour La Réunion et Mayotte

Hauteur significative des vagues de la mer totale (m) de WW3 le 31 janvier 2013 à 18 h UTC, lors du passage de l’ouragan Felleng (catégorie 3) à La Réunion. Les flèches violettes foncées représentent la direction de la houle primaire, les claires la houle secondaire et les noires la mer de vent.
Hauteur significative des vagues de la mer totale (m) de WW3, le 31 janvier 2013 à 18 h UTC, lors du passage de l’ouragan Felleng (catégorie 3) à La Réunion. Les flèches violettes foncées représentent la direction de la houle primaire, les claires la houle secondaire et les noires la mer de vent. © Météo-France

Fin 2015, la seconde phase du projet HOMONIM (Historique, observation, modélisation des niveaux marins), conduit par Météo-France et le Service hydrographique et océanographique de la marine (SHOM), a été lancée avec le soutien du MTES (Ministère de la Transition écologique et solidaire) pour améliorer les outils de prévisions des surcotes et des vagues à la côte, notamment en outre-mer. Après sa mise en place sur les côtes antillaises et guyanaises en 2016, une configuration du modèle de vagues haute-résolution, WaveWatch 3 (WW3) avec une grille irrégulière, a été déployée pour La Réunion et Mayotte en 2017.

Cette configuration a pu bénéficier d’une modélisation de la bathymétrie côtière à 100 m produite dernièrement par le SHOM . Plusieurs paramétrisations, décrivant l’état de la mer et l’interaction avec le fond, ont été testées sur des événements marquants de ces dernières années. Ces épisodes correspondent en grande majorité à des cyclones, comme l’ouragan Felleng (catégorie 3) de janvier 2013 (voir illustration).

Un premier domaine couvre les îles de La Réunion et Maurice et l’autre, l’archipel des Comores. Ces configurations sont forcées par les vents du modèle atmosphérique AROME Outre-mer, à 2,5 km de résolution, et sont imbriquées dans le modèle régional de vagues de Météo-France MFWAM, à 10 km de résolution. La résolution de WW3 atteint 100 m dans le lagon de Mayotte, permettant de bien représenter les passes et les détails bathymétriques, et 200 m près des côtes réunionnaises.

Le contexte spécifique du lagon mahorais nécessitera de tester le forçage par un modèle de niveau d’eau et de courants (marée et surcotes). Ce forçage devrait implémenté mi-2018 à une résolution de 200 m. En outre, ces configurations feront l’objet de re-jeux sur de nouveaux épisodes documentés pour parfaire leur validation ou leur calage.

Extension des APIC outre-mer

Le service Avertissements pluies intenses à l’échelle des communes (APIC), proposé par Météo-France, permet aux communes d’être informées lorsque les pluies observées revêtent un caractère exceptionnel sur leur territoire ou sur les communes environnantes. Mis en œuvre en 2011 en métropole, ce produit d’appui à la gestion de crise est disponible depuis 2016 à La Réunion et depuis octobre 2017 à la Martinique et à la Guadeloupe. Il devrait être étendu en 2018 à la Nouvelle-Calédonie.

Données et modélisation pour le programme Copernicus

Modélisation des vagues pour Copernicus (global et régional)

Les vagues jouent un rôle important dans les échanges de mouvement, de chaleur et de gaz entre l’océan et l’atmosphère. Dans le cadre des services Copernicus Marine (Copernicus Marine Environment Monitoring Service ou CMEMS) dont Mercator Océan assure la maîtrise d’ouvrage, Météo-France (DirOP/MAR) assure la fourniture du service vagues sur l’ensemble du globe à partir du modèle MFWAM pour là résolution 20 km. Le modèle global est forcé par les vents CEP et assimile les données altimétriques de plusieurs satellites. Les produits sont déclinés selon 17 paramètres décrivant l’état de la mer (hauteur de vagues, période moyenne et dérive de Stokes notamment). Le modèle de vagues MFWAM est aussi exploité pour le domaine régional Iberian Biscay Ireland (IBI) avec une résolution de 10 km dans le cadre d’une collaboration avec Puertos del Estados, AEMET, CESGA et Marine Institute. Le lancement des services CMEMS pour les vagues a démarré le 1er avril 2017. Dans la prochaine version V4 du système opérationnel CMEMS-IBI, le modèle de vagues MFWAM sera couplé avec le modèle de circulation océanique NEMO (Nucleus for European Modelling of the Ocean). Trois processus de couplage ont été implémentés. Le premier concerne le terme de forçage Stokes-Coriolis qui utilise la dérive de Stokes calculée par le modèle de vagues. Le deuxième processus consiste à prendre en compte le stress du flux de quantité de mouvement fourni à l’océan, et enfin le troisième processus prend en compte la turbulence liée au déferlement des vagues injecté dans la couche de mélange océanique. Les premiers résultats du couplage entre MFWAM et NEMO montrent un impact significatif sur les paramètres clés qui sont la température de surface, les composantes du courant, la salinité et la couche de mélange océanique.

Copernicus Atmosphere : un service européen de qualité de l’air pour les citoyens et décideurs

Pollen.

Copernicus Atmosphère (CAMS) vise à développer et mettre à disposition de tous les citoyens européens les éléments utiles à la surveillance de leur environnement. Le service régional CAMS, piloté par Météo-France et l’INERIS (Institut national de l'environnement industriel et des risques), fournit de manière opérationnelle des produits de prévisions, d’analyses et réanalyses de concentration dans l’air d’une dizaine de polluants sur l’Europe jusqu’à 4 jours d’échéance. Il inclut des prévisions de concentration de différents types de pollens. Ces prévisions sont aujourd’hui élaborées en combinant 7 modèles de chimie-transport, dont les modèles MOCAGE de Météo-France et CHIMERE de l’INERIS, ainsi que ceux développés par les meilleurs spécialistes de la qualité de l’air en Europe. Un produit ensembliste est également élaboré à partir de ces modèles. Tous les produits sont disponibles de manière libre et gratuite et ont vocation à être réutilisés dans des systèmes experts ou des systèmes aval. Le service régional de Copernicus Atmosphère propose aujourd’hui un service opérationnel, basé sur les derniers progrès de la recherche, offrant un haut niveau de disponibilité. Sur la France, le service est complémentaire de la plateforme nationale Prév’air et des plateformes locales des AASQA (Associations agréées pour la surveillance de la qualité de l'air). Le projet CAMS devrait s’enrichir encore à l’avenir, en exploitant des données satellitaires dont celles des programmes Sentinel.

CAMS fournit notamment des prévisions de concentration atmosphérique de pollens. Dès 2013, des prévisions de pollens de bouleau ont été mises en place sur l’Europe, puis ces prévisions ont été étendues aux pollens d’oliviers et de graminées en 2016. Ces espèces, sont reconnues par l’OMS comme parmi les plus allergènes, et le suivi et la prévision de leur concentration est donc un enjeu stratégique de santé publique.

Les flux d’émissions de pollens sont calculés en croisant des données météorologiques (champs de vent, d’humidité et de précipitations) et des informations relatives aux cycles biologiques des plantes émettrices. Pour les oliviers, l’accumulation de « chaleur » depuis le début de l’année est aussi prise en compte. Pour les graminées, la paramétrisation se base sur une probabilité d’émission autour de dates de pollinisation déduites d’observations passées.

L’extension aux pollens d’ambroisie, dont l’impact sanitaire est croissant, est en cours de développement dans le service et sa prévision devrait être opérationnelle dans le service Copernicus en 2018.

Pour en savoir plus : COPERNICUS.

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